Scénario & Dialogues |
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Mise en scène & Réalisation |
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Jeu d'acteur |
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Scènes érotiques |
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Intérêt du film |
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Note Générale |
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Les plus : originalité de la mise en scène, excellent jeu des acteurs
les moins : très éprouvant, mais réaliste
Ce film a déchaîné les passions. Beaucoup ont déversé leur fiel sans même l'avoir vu, ou pas jusqu'au bout.
Il faut certes dire que ce film est éprouvant. LA scène, oui. Mais aussi l'ambiance, avec cette caméra qui virevolte dans tous les sens, donnant le tournis, nous amenant le coeur au bord des lèvres. La musique, la lumière, tout concourt à une expérience synesthésique qui ne laissera pas le spectateur indemne. Le découpage à rebours met bien mieux en exergue la cassure, le basculement d'une vie brisée qui était auparavant si paisible et qui commence/finit par cette image bucolique de Monica Belluci lisant en position foetale sur la pelouse. Le spectateur, lui, sait ce qui l'attend...
Ce couloir, sombre et rouge sang, poisseux, qu'on imagine truffé d'exhalaisons urinaires fétides. Les talons aiguilles qui claquent contre le béton. Elle s'enfonce, s'enfonce dans le noir. Tend la main à un jeune transsexuel qui se fait battre. Et tombe ainsi entre les mains d'une ordure, elle trop belle pour se balader seule le soir.
Cette scène insoutenable, je l'ai soutenue, scotchée à mon siège, les jointures probablement blanches de serrer convulsivement les accoudoirs. Les coups sourds de la chair qui claque, qui fouaille, qui déchire. La violence ordurière des paroles. La douleur du visage et des larmes. L'impuissance d'une femme clouée au sol. Et la défiguration qui permet au bourreau de nier ce visage, cet être qu'il a anéantit. Rendre néant... C'est ce que fond ceux qui rangent leurs crimes dans les placard fermés à double tour de l'oubli. Gaspar Noé exhume de tous les placards les victimes niées. Les victimes néantisées.
D'ordinaire je déteste les scènes de viol au cinéma, car je les trouve obscènes, comme si le réalisateur voulait montrer quelque chose qu'il ne connaissait pas et qui ne le touchait que de loin. Gaspar Noé semble... savoir. On a décrié ce film, hurlé au scandale. Moi je pense qu'il est l'un des rares sur le sujet à ne pas être offensant car il est empreint d'empathie. Ce film EST un viol. Il aide au dialogue, car il exprime l'indicible: il est des douleurs qui enferment dans la solitude car elles sont inexprimables. Je déconseille ce film, paroxystique de violence, sauf à ceux qui veulent comprendre pour aider.
Le reste du film n'est pas là pour rallonger la sauce. La plongée dans les bas-fonds de Vincent Cassel, violent comme un fauve en rage, et du très très très talentueux Albert Dupontel, est totalement étouffante. Il y a la musique techno, assourdissante, qui fait battre le coeur plus vite et semble opprimer la cage thoracique. Il y a les couloirs sombres et tortueux, labyrinthiques dans lesquels les personnages masculins perdent leur âmes. Il y a les stroboscopes qui laissent entrevoir des scènes peu râgoutantes, et qui plongent par intermittence dans le noir, accentuant la perte des repères, et la peur tapie dans l'ombre. Il y a la violences de ces mâles qui se déchaînent, avec cette autre scène très choquante où le bras de Vincent Cassel est brisé sans qu'aucun détail ne nous soit épargné. Mais le plus marquant à ce propos reste la réaction totalement hors de contrôle d'Albert Dupontel. Lui l'intellectuel. Lui le doux. Lui le tempérant. Lui le gentil. Qui finalement tue à poings nus, incapable de s'arrêter de taper taper taper pour extirper de son être cette violence qui l'a contaminé par surprise.
La musique est terrible, aussi bien "mon manège à moi" qui nous plonge dans l'intimité d'un couple ordinaire vivant ses dernières heures de bonheur que "Tempus Edax Rerum" qui résume tout à lui tout seul. Irréversible.
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