Intégrale Le Déclic, tomes 1 à 4

Je partage ton avis - très intéressant. Je ne savais pas que Hugo Pratt (que j'aime beaucoup en revanche) estimait Manara: tu as des infos sur ce point?
Tu as de l'admiration pour les dessins de ce dernier apparemment - de mon côté, peu...

Hugo Pratt a chaperonné Manara, il l'a un peu "lancé", en tout cas c'est ce que j'avais lu à l'époque où Manara a percé. Manara avait commis une BD pour la mensuel (A Suivre) qui s'appelait "HP et Giuseppe Bergman", dans ce récit, le personnage HP était Hugo Pratt. Le récit, comme toutes les aventures de Bergman, était assez incohérent et durait des pages et des pages. A l'époque, la virtuosité de Manara avait très favorablement impressionné les amateurs de BD. Mais, pour reprendre une critique lue dans un magazine spécialisé, le problème de la virtuosité est qu'elle ne montre qu'elle même, comme projet artistique c'est un peu court... Et c'est le problème des BD érotiques de cet auteur : c'est trop superficiel, ça ne montre pas grand chose, ça ne vit pas. Même dans des projets plus profonds comme "L'homme de papier", c'est figé, bref à mes yeux ça manque de crédibilité.

Sinon oui, j'aime bien le dessin de Manara, je trouve que c'est un bon illustrateur. Mais en même temps, les femmes sont trop froides, les hommes trop caricaturaux, la cohérence entre le récit et le dessin laisse à désirer, bref, je trouve tout ça un peu léger et désincarné, il ya vraiment d'autres choses à dire sur le plaisir et ses rapports avec le pouvoir notamment.

"Le Déclic" a été publié par l'Echo des Savanes juste après un album délibérément pornographique écrit par Martin Veyron et qui s'appelait "L'amour Propre". Eh bien entre les deux c'est le jour et la nuit ! L'album de Veyron avait une vraie dimension, c'était un travail très intéressant sur le plaisir, l'amour, la fidélité, l'altérité et le couple, et en même temps une démarche vraiment aboutie sur ce qui, dans la sexualité, est immontrable, non dit mais pour autant essentiel.

Vraiment merci pour ces renseignements! J'attends avec impatience tes nouveaux avis.

Ca y est, je vais devenir tout rouge... @^-^@

C'est juste pour te dire qu'il est agréable de voir que les "nouveaux" membres du CDS vous apprennent plein de choses et présentent plein de qualités!
Mais après, plus de compliments, éhéhé! [meuh non!]

Ayé, j'ai proposé une fiche sur "L'amour propre", j'espère que ça compensera le déferlement de Manarâneries ! ;-)

Et j'ai d'autres albums à soumettre mais là j'ai le repas à préparer, bisous et bonne soirée à tous !

J'arrive en retard dans le débat, mais je trouve votre avis assez... contemporain, Nicolas. J'entends par là que j'ai la sensation de lire un commentaire sur l'oeuvre et sa valeur au jour d'aujourd'hui (ce qui, soit dit en passant, n'est pas une critique, puiqu'il s'agit bien d'un avis actuel qui est demandé, mais bon, j'élargis :p). Je reste entierement d'accord avec vous sur le "business" Manara (bien qu'en revanche je ne partage pas du tout votre suggestion que Manara aurait fait entrer la BD dans l'ère du mercantile... Il a eu de bons maitres chez certains confreres...), car il a parfaitement, à l'image d'un Loisel, utilisé la machine éditoriale pour transformer un ou deux albums en une multitude de produits dérivés. Je ne partage pas votre avis sur le vide que semble représenter pour vous cette oeuvre. Certes les tomes 3 et 4 n'ont pas la dimension des 2 premiers. Il n'empeche que proposer de la bande dessinée erotique grand public à l'époque relevait de la performance : danser sur un fil aussi fin, peu d'auteurs ont réussi à le faire. Malgré ma maigre connaissance de la BD erotique, je pretendrais que seuls Serpieri et Manara ont réussi a imposer un style propre, et une phantasmatique qui leur sont personnels.
Encore une fois, trop de Manara tue Manara. Mais ce sont des albums a replacer quand meme dans leur contexte, et je crois -en amateur de BD 'traditionnelle'- que réellement les Déclics sont des oeuvres qui non seulement ont marqué leur temps, mais aussi toute l'histoire de la BD...

Cher Mien, je partage avec vous l'idée que Manara est d'une époque et vous avez raison, une série d'auteurs sont entrés dans les 80's dans le BD mass businees, il serait injuste de n'accuser que Manara.

Mais quand même, "La quête de l'Oiseau du temps" ça vivait, ça bougeait, ça criait ! Donnez moi mille fois des "Nathalie la petite hôtesse" pour représenter l'époque mais franchement, "Le Déclic !"... Ces personnages figés comme dans un roman photo m'affligent, et la trame des récits tout autant. Je n'ai pas l'album sous les yeux et c'est dommage mais je trouve que l'image qui le représente le mieux est, dans les premières planches, cette sène où deux couples de jumeaux se draguent dans la rue. Manara dessine ici une image forte en se moquant du stéréotypisme ambiant mais en réalité, il dévoie la caricature. Tout se passe comme s'il disait implicitement "vous voyez, je sais repérer les travers de mon époque, donc je suis un vrai auteur parce qu'en les caricaturant je montre que je ne suis pas dupe."

Mais le procédé utilisé ici n'est que de l'intoxication, comparable, toute chose égale par ailleurs, à ces hommes politiques qui dénoncent la politique politicienne et veulent par là nous faire croire qu'ils n'en font pas. Eh bien Manara fait pareil, il dénonce l'artificialité et les stéréotypes pour nous infliger les siens avec plus de force encore. C'est tout ce qu'on veut mais moi je ne trouve pas ça honnête comme démarche. Elle supprime toute mise à distance par le lecteur.

La preuve, on aurait pu s'attendre à une amélioration des scenarri ensuite, avec les tomes suivants et on n'a assisté qu'à un apauvrissement général. Manara : un auteur qui raconte moins bien en prenant de l'expérience, affligeant !

Pour autant, je concède que je trouve tout de même quelque amélioration entre les séries Giuseppe Bergman et le premier tome du Déclic. Et puis ne le répétez pas mais j'ai plutôt aimé le scénario du "Parfum de l'Invisible" premier opus. Quant au scénario de "L'homme de Papier" il était pas mal du tout, normal, il n'est pas de Manara... :o)

Parce que vous avez probablement décodé aussi mon envie de polémiquer... ;-) (Et en plus Pratt l'aimait bien et l'a boosté, alors, je l'avoue, je me heurte à forte partie...)

Je rajoute parce que je ne peux plus éditer mon commentaire (dommage j'avais pas fini...) : si c'était du second degré ça passerait et je pourrais considérer que c'est une oeuvre. Mais ça n'est pas assez fin pour en être.

coucou Nicolas, j'ai acheté un exemplaire format poche de cette série. Je ne l'ai plus.  J'aime bien les dessins, mais je ne suis pas connaisseur en la matière, par contre le détail du scénario m'avait laissé un peu froid. Je me suis toujours demandé si je devais essayer de regarder les numéros précédents. Puisque les 3&4 sont apparemment moins réussis, je me demande si celui que j'ai lu faisait parti de eux là. Si je te la décris, arriverais tu à me dire de quel numéro il s'agit ? Il y avait dedans une secte qui interdisait de satisfaire le désir, et deux femmes qui tentaient de soulager un ex-adepte avec leurs pieds ?