Avis |
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par Aretina 399
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08.12.2007 14:58 |
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Style, qualité d'écriture |
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Originalité des situations |
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Description des scènes d'amour |
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Intérêt de l'histoire |
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Note Générale |
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Les plus : langue soignée, cohérence du texte, narration élégante, inventaire surprenant de pratiques
les moins : le censure qui guette comme une éminence grise et qui est à l'origine de certaines réticences de la part de l'auteur, réticences qu'il évoque par le truchement de sa héroïne
"Fanny Hill" musardait sur l'étagère de la plus grande libraire de ma ville, parmi une foule d'autres tomes d'une célèbre maison d'édition anglaise. Il est important de préciser que j'ai lu ce roman anglais, donc une partie de mes points positifs sont à jauger de cette perspective.
Le roman en soi est le premier de son genre en Angleterre. Publié en 1749, il valut à John Cleland et à son éditeur des ennuis juridiques qui le forcèrent d'en rédiger une version mitigée en 1750. Malheureusement, ce livre sera anathématisé jusqu'à la seconde moitié du XXe siècle, quand il fut enfin exempté de l'accusation d'être un livre obscène. "Fanny Hill", réhabilitée, trône dès lors dans d'élysée de la littérature érotique.
Ce roman suit la mode des romans épistolaires, très courants à l'époque. Frances (apellée Fanny) Hill relate son parcours en deux amples lettres à une dame dont l'identité reste mystérieuse (et elle n'intéresse point). Notre héroïne retrace son chemin d'orpheline désemparée qui tente sa chance dans la grande ville jusqu'à son état actuel d'épouse et mère comblée. La description de ce trajet est une liste qui présente mœurs et pratiques d'alcôve de la société anglaise du XVIIIe siècle. Presque toute pratique et philie connue à l'époque y est répertoriée: homosexualité féminine et masculine, amour pluriel, fétiches, sado-masochisme... Les seules pratiques absentes sont celle inconnues pour des raisons purement chronologique.
On peut observer l'ascension de Fanny au fur et à mesure qu'elle découvre les pratiques: les plus communes et faciles à obtenir, vers le début, les "raffinements" quand sa réputation commence à prendre des contours et sa situation financière à devenir de plus en plus prospère: destinée à faire compagnie galante aux messieurs qui fréquentent des bordels, elle finit par avoir des clients privilégiés (un féru de flagellation, un trichophile autumnal) qui récompensent royalement son temps et participation.
Il serait d'ailleurs très prudent de ne pas se précipiter à cataloguer ce livre comme lecture légère: abstraction faisant du genre, le texte est parsemé de considérations philosophiques qui permettent de le classifier également comme tableau social et invitent à réfléchir sur la condition des femmes nées hors des sphères où une ombre de protection leur était assurée.
Un livre qui mérite d'avoir sa place dans chaque bibliothèque. A recommander chaleureusement.
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Commentaires |
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par Lavax 300
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08.12.2007 15:12 |
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Merci de me faire découvrir ce volume! Tu peux nous en dire davantage sur l'auteur (c'est un pseudo, ou non? Il a écrit autre chose?)
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par blue 300
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08.12.2007 15:16 |
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Merci Arétina!
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par Aretina 399
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08.12.2007 15:26 |
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Hello, Lavax! :)
John Cleland (1710-1789) est le nom reel de l'auteur. Il fut parmi autre, journaliste, dramaturge et traducteur. Son père, William, fut un des amis d'Alexander Pope. Quant a autres œuvres érotiques, dans la préface de mon volume on mentionne encore 4 romans de charme, dont, sans trouver leurs titres, on nous apprend seulement qu'ils ont connu moins de succès que "Fanny Hill". Sur le net j'ai réussi a trouver quelques titres: "Memoirs of a Coxcomb", "The Woman of Honour" et "The Surprises of Love ".
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par Loguil 300
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10.12.2007 13:04 |
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Je l'ai lu voici bien longtemps. En anglais aussi... Pour qui voudrait lire en français, je signale que le site Gallica permet de télécharger l'édition française « ornée de six compositions d'après la suite gravée par William Hogarth : _La Destinée d'une courtisane_ ». La préface est d'un certain Apollinaire, Guillaume, auteur prématurément soustrait à l'affection de ses amis sans avoir pu devenir vergeteux (et pourtant, il n'en manquait guère, de verges à son actif). Or donc, cette édition, due à la Bibliothèque des curieux, col. Les Maîtres de l'amour, présente les _Mémoires de Fanny Hill, femme de plaisir_ (sans doute suprême, et le singulier contraste avec la pluralité des mémoires de jouissance de la donzelle de joie), « avec des documents sur la vie à Londres au xviiie siècle, et notamment la Vie galante d'après les Sérails de Londres ». Que tout ceci est joliment dit.
Pour qui s'intéresserait aux turpitudes et polissonnades de la période victorienne, je signale le livre de Françoise Barret-Ducrocq, _Pauvreté, Charité et morale à Londres au xixe siècle_. Lecture peu folichonne, car il s'agit de son mémoire de thèse, qui porte sur l'exploitation d'un fonds d'archives d'une maison de bonnes œuvres. En France, diverses congrégations religieuses, dont celle, angevine d'origine, des sœurs du Bon-Pasteur, s'occupaient de l'éducation des filles pauvres ou délinquantes. On sait, au moins pour l'Irlande, que ce n'était pas toujours très gai pour les pensionnaires. En Angleterre, on recueille les filles de joie, les (futures) mères célibataires, les jeunes femmes errantes et en contrepartie du gîte et du couvert, on les fait trimer. Mais pour être admises, il faut qu'elles disent tout-tout-tout et le reste sur elles-mêmes, leurs pratiques, y compris intimes. D'où le livre, découlant de la découverte de ces dépositions.
Au fait, quand Arétina, se plongeant dans les rapports de police et les archives des maisons de correction pour femmes, nous livrera-t-elle un pavé sur la sexualité en Roumanie durant la période communiste ? ;-)
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par Aretina 399
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10.12.2007 13:46 |
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Hello, Loguil! :)
Temeraire entreprise, celle que tu proposes! Il serait effectivement interessant, mais ces données sont difficilement (si pas impossible) accessibles, meme ax gens dont l'autorite leur confererait ce droit. Tout ce que je pourrais raconter, ce sont mes vagues connaissances sur le fameux Decret 770 de 1966, qui eut un impact decisif sur la sexualite dans mon pays.
Les seules analyses concernant la sexualite dans sa manifestation intime dans mon pays furent entamees par une jeune specialiste en mentalite, Constanta Vintila-Ghitulescu qui, en s'appuyant sur documents juridiques du XVIIIe et XIXe s., a trace un portrait de cet aspect de la vie privee.
Sinon, "Fanny Hill" est effectivement une des premieres traductions de genre erotique: Costache Negruzzi y tenta le coup environ 1850.
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par Lavax 300
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10.12.2007 13:57 |
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Merci pour toutes ces infos, Loguil, et Aretina!
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